jeudi 19 juillet 2012

Nostalgie...

Je suis au travail. Mon bureau est situé dans la rue principale du village où je me rends chaque jour pour passer le temps, et accessoirement gagner de l’argent.En face de mon travail, il y a une cordonnerie et un institut de beauté. Et au-dessus, il y a une résidence avec des appartements et des balcons. Chaque jour, je vois ce couple de personnes âgées, je ne saurais trop dire quel âge ils ont mais en tout cas celui qui fait qu’il pourrait être mes grands-parents. 

J’aime bien les observer, parce qu’ils vivent encore ensemble, et que je me prends à imaginer qu’ils ont du se connaître très jeunes et qu’ils ont du traverser ensemble bien des épreuves pour arriver à cette routine tranquille qu’est la leur. Et puis certainement aussi parce qu’ils me rappellent mes grands-parents disparus. Parce que Grand-père était comme ce monsieur, il fumait sa gitane bleue au milieu des fleurs et jardinières que Grand-mère avait pris soin de planter et entretenir, en suivant le fil des saisons qui s’écoulaient. Comme cette dame, logiquement flétrie par le temps qui passe, qui regarde la vie au travers de sa fenêtre, accompagnée de son chat, qui fonce renifler l’air des fleurs sur le balcon dès qu’il en a l’occasion. 

La seule différence vraiment flagrante que je trouve, et c'est très certainement parce que je parle là de mes grands-parents, mais ils étaient bien plus beaux. Alors parfois j'aimerais revenir en arrière, quand j'arrivais après l'école pour le goûter et que Grand-Père était tranquillement installé sur la table de la cuisine, avec son dictionnaire, sa gomme, son crayon de papier et sa grille de mots croisés, et qu'il levait les yeux pour accueillir sa petite-fille.Quand Grand-Mère me prenait sur ses genoux en me serrant fort dans ses bras et en me berçant, même si je n’avais déjà plus l’âge.
Ma meilleure amie, quand j’étais adolescente, me disait souvent qu’elle ressentait une grande nostalgie lorsque je lui parlais de mon enfance. Et elle avait – et a – toujours raison. Parce que c’est dans cette maison que j’ai passé les meilleurs moments de mon enfance. C’était un peu la maison du bonheur à vrai dire, avec les repas de famille interminables tous les dimanches et l’incontournable poulet – purée (avec le petit puis pour mettre la sauce). Puis quand après manger on s’en allait, avec les cousins, grimper dans le sapin du parc cet que c’était à celui qui monterait le plus haut. A cette époque-là, on était une famille comme dans les films, une famille sans histoire. Et c’était bien, c’était beau. Jusqu’à ce que la maladie l’emporte.

Image volontairement sans rapport

On dit souvent que les meilleurs partent les premiers. Ma Grand-Mère était une de ces maîtresses femmes qui émanait la gentillesse et l’amour. Courageuse aussi. Moi, pendant les dix ans où elle s’est battue contre la maladie, je crois que je n’ai jamais réalisé le fait qu’elle était souffrante. Je ne m’en suis rendue compte que bien plus tard, en regardant les photos de l’époque. Parce que physiquement je la regardais avec les yeux de la petite fille plein d’amour, mais aussi parce qu’elle ne laissait rien paraître. Elle nous a emmené, mes cousins, ma sœur et moi, en forêt construire des cabanes, visiter les châteaux de la Loire, voir la tour Eiffel à Paris, elle nous faisait faire des gâteaux…
Après son départ, la maison du bonheur n’était forcément plus la même. Et mon Grand-Père non plus. Sûrement parce qu’ils étaient de la génération où on se rencontre, on s’aime, on se marie et on ne se quitte plus. Alors Grand-Père s’est laissé partir lui aussi, on peut dire qu’il est mort d’amour. En laissant derrière lui la descendance marquée d’une plaie qui ne cicatrisera jamais définitivement je crois.

Presque quinze ans après, on peut dire qu’on a tous relevé la tête et poursuivit notre bout de chemin, plus ou moins facilement bien sûr. Moi j’ai appris à vivre et grandir sans eux, sans leurs conseils, et je pense m’en sortir plutôt pas mal.
Mais je crois qu’un regret pèsera toujours, un seul. Je ne pourrais jamais m’entendre dire 

« Nous sommes fiers de toi ma petite-fille ».


2 commentaires:

  1. Bien que je sois née en France, j'ai des origines andalouses et je connais très mal ma famille qui est restée là-bas. Les seules personnes qui pourrait me raconter qui étaient mes grands-parents, avec du côté maternel, un grand-père républicain et résistant, mort sous le franquisme et une grand-mère décédée à la fin des années 90, que je ne voyais que lorsque je partais en vacances en Espagne. Du côté paternel, je n'ai quasiment aucun souvenir, ils sont tous deux morts alors que je n'étais qu'une petite fille... Ton texte est touchant et je comprends mieux que les gens que l'on aime, ce n'est pas pour ce qu'ils sont ou représentent dans notre société, mais dans notre coeur... Merci. Bises

    RépondreSupprimer
  2. Coucou =)
    Ton commentaire est aussi très touchant. Merci pour ce que tu as raconté.(et moi aussi j'suis d'origine espagnole, mais plus éloignée que toi je pense ;)

    RépondreSupprimer